De ce que l'on devrait dire - écrire - mais que l'on ne dit pas - et tait à force de silence - de ce qu'il faudrait défaire - déprendre - pour que le temps s'ouvre - mais qui reste impassible
Et du silence dont il faudrait parler - ou bien peut être pas

Seulement laisser la place d'être, se tenir là juste au bord de ce que l'on voit venir
pour que se profile la silhouette
Et si l'on parlait du silence - croyant au moins que ce serait possible - mais sans y arriver - tourner dans les paroles jusqu'au point de se taire
Chouette programme de ritournelle
Voilà ce qu'il faudrait songer
Mais l'on y pense trop à ne pouvoir le faire
Et de ce qu'il en pense - lui - loin déjà



Les écritures et langages ont été trouvés, afin que présents, absents, vifs et morts, manifestant l'un à l'autre le secret de nos cœurs, plus facilement parvenions à notre propre félicité, qui gît en l'intelligence des sciences, non point au son des paroles : et par conséquent celles langues et celles écritures devraient plus être en usage lesquelles on apprendrait plus facilement. Las et combien serait meilleur qu'il y eût au monde un seul langage naturel que d'employer tant d'années pour apprendre des mots!

Du Bellay


5 commentaires:

et combien serait égale la réalité prise sur un unique langage,
quand déprise sur tant, elle prend épaisseur et volume.
(oui : la réalité déprise sur les multiples diffractions des langues - et des langages.)
Et Du Bellay, déjà, est d'un autre pays, d'une autre langue - de là où il parle, sa voix dit le parcours qu'elle emprunte pour arriver jusqu'ici. Les multiples engagés qui nous la rendent vibrante dans son épaisseur.
non ?

[quant à parler du silence, l'épaisseur nombreuse des langages a tant de mots pour la dire]

15 septembre 2007 à 22:20  

Toute rhétorique sa posture à lui - encore plus dans le souhait d'un langage naturel - lui qui veut - qui souhaite que se déploie la langue -
et c'est pour ça aussi qu'elle me plait - sa langue - pour l'ironie de celui qui porte une voix épaisse de langages et qui joue à souhaiter qu'il y eut un verbe commun et une langue naturelle

[Parce qu'en dépit des mille langues - on n'en est pas sorti de la nostalgie de Babel -]

Quant au silence, on se dépatouille à faire croire de le dire - mais c'est à cette tentation que j'aimerais résister pour défaire un peu la frénésie bavarde, le rythme commentaire...

16 septembre 2007 à 08:33  

"tourner dans les paroles jusqu'au point de se taire"

c'est bien ça - toucher le point où on serait prêt de basculer dans le silence, cette ligne de crête suivie.

(et désolé pour le commentaire - c'est que tout cela m'intéresse)

...

16 septembre 2007 à 13:24  

"basculer dans le silence" et on en sort - parfois - du haut de quelques phrases
alors merci pour les saillances des commentaires
être lu et repris - c'est déjà beaucoup...

16 septembre 2007 à 18:52  

"être lu" - oui, "et repris" - ou comme il disait : en lisant en écrivant sans ponctuation, même mouvement : et ici, un endroit où lire et écrire : la même chose ; et reprendre alors, et porter la même charge où défaire le silence - la même charge en partage.

16 septembre 2007 à 22:53  

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