"L'entaille.Le trait, bref, instantané.
Rectiligne.
Il s'inscrit dans de grandes sinuosités d'ensemble, des ovales. Des diagonales, des mises en travers, qui sont comme les tendeurs d'une ordonnance en croix.
Le cubisme a réinventé cette dynamique, source de déséquilibre, donc d'énergie, à partir d'une structure stable, immuable : verticalité, horizontalité. Pas d'expression. Ou plutôt, pas d'expressivité. Ni sourire ni prière ni cruauté ni consolation. L'accident du quotidien n'a pas place. Ni le signe distinctif de l'individuel.
Cependant, aucune figure Mezcala ne reproduit l'autre. Chacune est incomparable, s'inscrivant dans un style d'une cohésion rigoureuse qui fait le paradoxe de cet art. Comme s'il était issu de la main (de l'âme) d'un seul créateur. Quel autre exemple d'une pareille unité dans la diversité ? Les Cyclades ? Mais on pense aussi à l'île de Pâques. Pâques et ses statues gigantesques. Les Mezcala ont cet attribut, la monumentalité.
Quelle que soit leur dimension (généralement modeste). Hauts comme trois pommes ils paraissent colossaux, dressés dans un espace illimité. Hors temps. Compacité de la masse, fluidité des lignes qui la composent. Tension et harmonie. Que raconte Mezcala ? Rien. Aucun support à la narration. Que font ces représentations humaines ? Rien. Elles sont là."

Michel Vinaver, Figures de Pierre, livret d'exposition d'une exposition consacrée à l'art du Guerrero dans le Mexique précolombien


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